Je n'étais pas née en janvier 1984. On ne nous en a pas
parlé à l'école. Mais heureusement notre Père de la Nation a voulu nous donner
une leçon d'histoire en nous faisant revivre les journées de janvier 84 où des
centaines de citoyens furent massacrés par les mêmes forces du désordre qui,
depuis 5 jours, tirent et matraquent aux quatre coins du pays profond, du pays
oublié. Il a en effet choisi - ou on a choisi pour lui - le même bureau, pour
s'adresser ce soir au peuple, que celui à partir duquel le Combattant Suprême
s'était adressé à ses enfants turbulents.
Désormais, Habib Bourguiba s’est
réincarné dans la peau de Béji Caïd Essghrir (comme Victor Hugo avait
surnommé Napoléon III "Napoléon Le Petit", par rapport à son oncle
Napoléon Ier) en essayant de ressusciter un peu du charisme de son chef
disparu. Malheureusement il est incapable de convaincre. Encore pire, à cause
de l’âge (89 ans), notre dinosaure n’est plus capable se souvenir des phrases
qu'il a prononcées quelques instants plus tôt.
Résultat : un discours vide, répétitif, bafouillant des mensonges et des
histoires internes du parti, dont le pauvre peuple, menacé chaque soir sur les
plateaux de télé par des flics politicards et des politicards flics qui se présentent comme ses sauveurs contre le
terrorisme, se fout complètement. Ils disent tous qu'ils n'ont pas voulu
utiliser la force jusqu’à maintenant mais qu'ils seront obligés de le faire si
"ça" continue. Ça, c'est l'intifada TRAVAIL JUSTICE DIGNITÉ, qui a
commencé à Kasserine il y a 5 jours.
Assignés à résidence par un couvre-feu de 20h à 5heures,
nous voilà condamnés à zapper : on a le choix entre Borhène Bsaies, Mariem
Belkadhi et Mohamed Booughalleb, les trois manipulateurs-en-chef. Ils sont là,
sur les plateaux, pour appuyer et
justifier tous le discours des flics invités, et en rajoutent, nous ressortant
la fameuse " main invisible" qui tire les ficelles des révoltes,
menaçant la stabilité (?) et la prospérité (?) du pays. Et voilà les chômeurs, diplômés ou non, transformés en marionnettes diaboliques, en petits chitanes, qu'il faut écraser. C'est tellement gros
qu'on se demande s'ils sont aussi cons que ça, en nous prenant pour des cons.
Nous connaissons ces discours par cœur, depuis l’ère de Ben
Ali durant les premiers souffles de la révolution tunisienne et partout dans le
monde, chaque fois que les gens se soulèvent contre l’injustice.
Nous sommes un peuple assigné à résidence : non seulement,
la grande majorité d'entre nous ne peuvent pas sortir du pays, mais encore nous
ne pouvons même plus sortir de nos domiciles, condamnés à avaler la propagande
des télévisions couvreuses de feu. Et à regarder dans nos frigos, que nous
n'avons pas volés, s'il reste quelque chose à manger.
Qui pillait les magasins en janvier 2011 ? Un petit rappel pour les amnésiques
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